
Vous n’avez pas à « prouver ». En matière de harcèlement moral au travail, le code du travail aménage la charge de la preuve : le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, puis l’employeur doit démontrer que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. L’essentiel est de constituer un dossier précis et concordant pour faire cesser les agissements et faire valoir vos droits.
Ce guide détaille la méthode pour prouver un harcèlement moral, les moyens de preuve recevables et les recours pour faire cesser la situation.
Le harcèlement moral au travail se définit par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Cette définition, posée par le code du travail, vise les faits de harcèlement moral indépendamment de toute intention de nuire alléguée par l’auteur du harcèlement (source : Légifrance).
Concrètement, il peut s’agir de critiques systématiques, humiliations, isolement, surcharge injustifiée, objectifs inatteignables, consignes contradictoires, dénigrement public, retrait d’outils de travail. Ce sont les agissements répétés et leurs effets sur la situation de travail qui comptent, pas un incident isolé.
La prévention relève aussi de l’obligation générale de sécurité de l’employeur, qui doit protéger la santé physique ou mentale des travailleurs et prévenir les risques.
En matière de harcèlement moral, la charge de la preuve est aménagée. Le salarié n’a pas à démontrer seul l’intégralité des faits. Il doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction au regard de ces échanges contradictoires (source : Légifrance).
Le code du travail renforce la protection du salarié : aucune personne ayant subi, refusé de subir, relaté ou témoigné de faits de harcèlement moral ne peut être sanctionnée, licenciée ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire. Les actes pris en violation de cette protection sont nuls.
La question centrale est « comment prouver ». Voici une méthode pas à pas qui fonctionne devant le conseil de prud’hommes.
Première étape : consigner précisément les agissements. Tenez un journal factuel daté décrivant les faits, les propos, les témoins éventuels, les impacts concrets sur votre travail. L’objectif n’est pas d’écrire un récit à charge, mais d’objectiver des agissements répétés qui dégradent vos conditions de travail. Cette chronologie aidera le juge à comprendre la répétition et la cohérence d’ensemble.
Deuxième étape : collecter des éléments de preuve variés et concordants. Emails, messages professionnels, SMS, compte-rendus d’entretien, objectifs fixés et modifiés, rappels à l’ordre, évaluations, plannings, statistiques d’activité, captures d’écran d’outils internes, preuves de retrait de moyens. Croisez ces éléments pour qu’ils se répondent dans le temps. Tous les supports écrits sont utiles, y compris ceux émanant de l’employeur.
Troisième étape : documenter l’impact sur votre santé physique ou mentale et sur votre activité. Consultez le médecin du travail, faites constater la dégradation, demandez des aménagements si nécessaire. Les certificats médicaux, arrêts de travail, préconisations de la médecine du travail sont des pièces essentielles pour caractériser la dégradation des conditions de travail susceptible d’altérer votre santé (source : Ministère du Travail).
Quatrième étape : alerter par écrit l’employeur et, si l’entreprise en dispose, le CSE et le référent compétent pour le harcèlement sexuel et les agissements sexistes, mais pouvant aussi orienter les cas de harcèlement moral. Cette alerte crée une trace et déclenche l’obligation de prévention et d’enquête de l’employeur (source : Code du travail).
Devant le juge prud’homal, tous les moyens de preuve peuvent être produits, sous réserve du respect des droits fondamentaux. Les écrits de travail, messages, notes de service, objectifs et évaluations sont recevables. Les attestations de collègues, clients ou fournisseurs, rédigées sur le modèle CERFA et accompagnées d’une copie du justificatif d’identité, ont une forte valeur probante (source : Service-Public).
Les certificats et comptes rendus médicaux, notamment du médecin du travail, établissent le lien entre les conditions de travail et l’atteinte à la santé (source : Ministère du Travail).
S’agissant d’enregistrements clandestins ou de preuves obtenues de façon déloyale, la Cour de cassation a opéré un revirement majeur le 22 décembre 2023 : l’illicéité ou la déloyauté n’emporte plus automatiquement l’irrecevabilité. Le juge doit mettre en balance le droit à la preuve et les droits en présence et peut admettre une preuve « déloyale » si elle est indispensable et proportionnée au but poursuivi. En pratique, cela ouvre la porte à des enregistrements réalisés à l’insu d’une personne, sous conditions strictes (source : Légifrance).
Restez mesuré : privilégiez d’abord les preuves « propres » et ne collectez pas de documents manifestement confidentiels sans conseil.
Signalez par écrit les faits à l’employeur
Il lui appartient de prévenir, faire cesser et sanctionner les agissements. Sa carence peut engager sa responsabilité au titre de l’obligation de sécurité et de prévention des risques (source : Légifrance).
Consultez la médecine du travail
Elle peut proposer des aménagements temporaires ou durables, alerter l’employeur et recommander des mesures individuelles de prévention lorsque la santé est menacée.
Alertez l’inspection du travail
Un agent de contrôle peut vérifier les faits, diligenter une enquête et, en cas d’infraction, informer le procureur de la République. Le service national d'information en droit du travail est joignable au 0 806 000 126.
Si la situation perdure, saisissez le conseil de prud’hommes. Le délai de prescription pour agir en raison d’un harcèlement moral est de cinq ans à compter du dernier fait. En référé, le juge peut ordonner des mesures urgentes pour faire cesser les agissements. Il statue sur la reconnaissance du harcèlement, les dommages et intérêts, et les conséquences sur le contrat de travail (source : Service-Public).
Un licenciement prononcé en méconnaissance des protections légales est nul. Aucune personne ne peut être licenciée pour avoir subi ou refusé de subir un harcèlement moral, ni pour l’avoir dénoncé de bonne foi. La nullité emporte des effets renforcés, notamment la réintégration si le salarié la demande ou, à défaut, une indemnisation spécifique.
Au pénal, le harcèlement moral est un délit puni de deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende ; ces peines peuvent être aggravées selon les circonstances prévues par le code pénal.
N’agir qu’oralement : sans écrit, la preuve s’effrite. Formalisez vos alertes à l’employeur et au CSE, et conservez les réponses.
Confondre conflit ponctuel et harcèlement moral : Un désaccord isolé ne suffit pas ; ce sont les agissements répétés et leurs effets objectivables qui caractérisent le harcèlement.
Tout miser sur un seul enregistrement clandestin : Depuis décembre 2023, un tel enregistrement peut, sous conditions, être admis. Mais il reste préférable d’adosser la preuve à un faisceau d’indices concordants, en respectant la proportionnalité (source : Légifrance).
Négliger la médecine du travail et l’inspection du travail : elles sont des leviers pour faire cesser rapidement une situation de harcèlement au travail (source : Ministère du Travail).
Caractériser juridiquement des agissements de harcèlement moral, bâtir une preuve recevable et choisir la meilleure stratégie (démarches internes, référé, action au fond, pénal) exigent une expertise fine du droit du travail et de la preuve. Un avocat spécialisé saura qualifier les faits, sécuriser les moyens de preuve, conduire les échanges avec l’employeur et porter votre dossier devant le conseil de prud’hommes.
Vous l’avez compris, face à une situation de harcèlement moral, être accompagné par un avocat spécialisé est la clé pour constituer des preuves solides.
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